Nous vous renvoyons, à ce sujet, aux nombreux articles concernant la prestigieuse unité de renseignement 8 200, spécialisée dans l’écoute électromagnétique et le déchiffrement des codes, regroupe des jeunes triés sur le volet, les meilleurs en mathématiques, en physique et en informatique, qui y accomplissent leur service militaire avant d’essaimer dans des entreprises technologiques, majoritairement israéliennes ou états-uniennes, ou de fonder leur propre start up.
Le magazine d’actualité hebdomadaire français Le Point a fait état, en 2013, de 43 réservistes de cette unité ayant déclaré refuser désormais « de participer aux actions contre les Palestiniens et de continuer à être les outils du renforcement du contrôle militaire sur les territoires occupés ». Cet article rappelle qu’alors que, jusqu’en 2001, la mission de cette unité était entièrement tournée vers des ennemis extérieurs, comme la Syrie, le Liban ou l’Iran, le premier ministre Ariel Sharon aurait ajouté les Palestiniens à cette liste au début de la seconde intifada.

Comme exemple notable de l’implication d’Israël, ces dernières années, dans la cyberguerre internationale, on peut citer le probable, bien que non prouvé, codéveloppement, avec les États-Unis, par l’unité 8 200, du virus informatique Stuxnet, dont l’objectif était de compromettre le développement du programme nucléaire iranien. Ce virus extrêmement sophistiqué, qui s’est propagé à partir de 2009, aurait, effectivement, temporairement ralenti ce programme, en détruisant un cinquième des centrifugeuses nucléaires iraniennes. Stuxnet aurait été testé, selon le New York Times, au sein du complexe nucléaire israélien de Dimona, sur des centrifugeuses presque identiques à celles situées sur le site iranien de Natanz, où des scientifiques iraniens s’efforçaient d’améliorer le processus d’enrichissement de l’uranium.

En octobre 2018, le quotidien israélien Haaretz publie une « bombe », un modèle d’investigation journalistique extrêmement détaillé titré (traduction libre) « L’industrie de cyberespionnage israélienne aide des dictateurs à travers le monde à chasser des dissidents et des homosexuels » (texte complet).

L’actualité le prouve : les entreprises de haute technologie israéliennes n’hésitent pas, avec l’accord tacite de l’appareil étatique israélien, à vendre, au plus offrant, et notamment à des régimes autoritaires, voire totalitaires, des technologies de cybersurveillance, ces derniers les utilisant pour espionner des opposants politiques. Ainsi, un ami du journaliste Khashoggi sauvagement assassiné le 2 octobre 2018 dans le consulat d’Arabie saoudite d’Istanbul, un dissident saoudien exilé au Canada, aurait eu son téléphone infecté, quelques mois auparavant, par le logiciel espion Pegasus développé par la start up israélienne NSO, une information relayée dans l’article ci-dessus mentionné :

Earlier this month, Citizen Lab announced with “high confidence” that Pegasus spyware was used to track Omar Abdulaziz, a Saudi dissident living in Canada under political asylum. According to the organization’s report, agents of the regime in Riyadh used NSO technology in Montreal against Abdulaziz. NSO did not deny the report.

Le lanceur d’alerte Edward Snowden a déclaré, à ce sujet : « This is not a cyber security industry, it’s a cyber insecurity industry. » (On devrait parler d’une industrie de cyber-insécurité plutôt que d’une industrie de cyber-sécurité.)

Le logiciel Pegasus a encore fait parler de lui en mai 2019 : il aurait servi à introduire une faille de sécurité dans l’application de messagerie pour « téléphones intelligents » WhatsApp, dont le succès était, ironiquement, en partie dû au chiffrement des communications… Cette faille permettait, en autres, de prendre possession de la totalité du contenu du téléphone en question, de lire les messages texte envoyés ou reçus, ainsi que d’entendre et de voir aux alentours de l’appareil grâce au microphone et à la caméra… Voir l’illustration en anglais présentant l’étendue de ces accès, dans un article sur le logiciel Pegasus de la société de recherche de l’Université de Toronto Citizen Lab.

Dans son édition de juin 2019, Le Monde Diplomatique publie une coupure de presse reprenant une nouvelle publiée en anglais par Associated Press le mois précédent, selon laquelle le service de presse de Facebook aurait révélé avoir banni de ses pages une société de conseil politique et de lobbying israélienne, le groupe Archimedes, qui menait des campagnes de désinformation visant à influencer les élections dans plusieurs pays, principalement en Afrique, en Asie du Sud-Est et en Amérique latine. Facebook aurait supprimé 65 comptes israéliens, 161 pages, des dizaines de groupes et 4 comptes Instagram véhiculant des « infox » diffusées par cette entreprise.